Orphelins de Duplessis

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Orphelins de Duplessis
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Les orphelins de Duplessis est le nom donné à des milliers d'enfants orphelins qui ont faussement été déclarés malades mentaux par le gouvernement du Québec et confinés dans des institutions psychiatriques, des orphelinats et des crèches entre les années 1930 et 1960[1],[2],[3],[4].

On considère que c'est le cas le plus important de maltraitance d'enfants dans l'histoire du Canada mis à part les écoles résidentielles autochtones. Tous ces orphelins seront baptisés orphelins de Duplessis, car c'est à l'issue de décisions du gouvernement de Maurice Duplessis, premier ministre du Québec, que ces abus se sont perpétrés[4], [3]. À plusieurs reprises, ces enfants ont été battus, torturés et agressés sexuellement[1],[4].

Description

Stratégies de financement

Dortoir de l'Orphelinat Notre-Dame-de-la-Merci, Huberdeau, vers 1941. L'orphelinat est l'un des orphelinats impliqués dans le règlement sur les orphelins Duplessis.

En 1948, le gouvernement fédéral développe un programme de subventions dédiées aux services de santé provinciaux[1],[2]. Le premier ministre du Québec de 1936-1939, puis de 1944 à 1959[5], Maurice Duplessis, ⁣préconise d'administrer ce financement aux organisations religieuses, craignant l'ingérence de l'État dans leurs activités[1],[4].

C'est ainsi que le gouvernement du Québec, en coopération avec l'Église catholique romaine qui gérait les orphelinats et les écoles, développe une stratégie pour obtenir ces subventions fédérales pour des milliers d'enfants sous leur égide[6],[7],[8]. Ces subventions étaient trois fois plus importantes dans la gestion des cas internés en hôpitaux psychiatriques[2],[7],[5].

Orphelinat Notre-Dame-de-la-Merci, Huberdeau, vers 1941. L'orphelinat est l'un des orphelinats impliqués dans le règlement sur les orphelins Duplessis.

Dans certains cas, les orphelinats catholiques seront reclassifiés stratégiquement comme des institutions de soins de santé; dans d'autres, les enfants seront déplacés vers des asiles existants. Parmi les institutions visées, mentionnons Mont-Providence (Hôpital Rivière-des-Prairies)[n 1], Baie-Saint-Paul[n 2], Huberdeau[n 3], Saint-Jean-de-Dieu (Hôpital Louis-H.-Lafontaine)[n 4], Saint-Michel-Archange (Centre hospitalier Robert-Giffard, puis l'Institut universitaire en santé mentale de Québec)[n 5], Saint-Julien de Saint-Ferdinand-d'Halifax[n 6],[9] et l'Institut Doréa.

Ces enfants sont pour la plupart devenus orphelins suite à l'abandon par leur mère célibataire ou encore parce qu'ils sont nés hors mariage[1],[2],[4]. Beaucoup ont été faussement étiquetés de malades ou de déficients mentaux[2],[3],[7],[1],[8],[5].

Dénonciation des orphelins

Dans les années qui suivirent, les enfants devenus adultes commencèrent à dénoncer les mauvais traitements et les abus sexuels qu'ils avaient subis aux mains des prêtres, des sœurs et des administrateurs catholiques. Plusieurs ouvrages comme Les fous crient au secours (1961) seront publiés pour révéler les traitements subis[1],[2],[4],[7] .

Rappelant les abus par les Couvents de la Madeleine, les orphelins de Duplessis affirment qu'ils étaient réduits à l'esclavage et assujettis à des abus physiques extrêmes pour des écarts de comportement allant des électrochocs aux contentions[4],[7],[8]. Une fois majeurs, les orphelins de Duplessis quittaient ces institutions sans avoir bénéficié d'une éducation et d'une socialisation adéquate à la vie adulte[4]. Plusieurs de ces orphelins ont démontré avoir un niveau d'éducation inadéquat, un faible niveau de revenu, un niveau de stress élevé et une prévalence au suicide[4],[1],[8].

La Commission Bédard

En 1961, le gouvernement du Québec créée la Commission Bédard chargé d'analyser la situation de tous les hôpitaux psychiatrique de la province[1],[4]. Le Rapport de la Commission d’étude des hôpitaux psychiatriques déposé en mars 1962 par le Dr. Dominique Bédard[1],[10] contribue à mettre un terme aux pratiques d'internements des enfants dans les hôpitaux psychiatriques[1],[4].

Justice

Dans les années 1990, les survivants se sont regroupés sous le nom du Comité des orphelins et orphelines institutionnalisés de Duplessis (COOID) dans le but d'obtenir justice[4]. En plus de la responsabilité du gouvernement et de l'Église, le Collège des médecins du Québec[1] est ciblé après que certains des orphelins eurent trouvé des copies de leurs dossiers médicaux qui avaient été falsifiés[n 7][réf. nécessaire]. Classifiés comme mentalement déficients, plusieurs de ces enfants furent assujettis à une variété de tests de médicaments et utilisés dans d'autres expériences médicales[3],[8].

Poursuites

En 1992, c'est sous l'intiative d'Hervé Bertrand aux côtés d'autres orphelins de Duplessis qu'est intenté un recours collectif de 400 millions de dollars[7],[2],[4]. Un de premiers objectifs du recours était de recenser les orphelins. Après plus d'un an de travail, le regroupement réussi à rencontrer près de 1 800 orphelins avec l'aide de l'avocat Robert Fauteux. L'un des porte-parole du groupe auprès du Gouvernement du Québec fut l'écrivain et poète Bruno Roy[6].

Malgré les efforts déployés, le recours sera rejeté plusieurs fois[4], sous prétexte que les sévices vécus n'étaient pas d'ordres similaires pour toutes les victimes[4].

Enquête policière

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Excuses officielles et programme de réconciliation

Devant l'échec des procédures légales, le Comité des orphelins et orphelines institutionnalisés de Duplessis (COOID), sollicite l'aide de Daniel Jacoby du Bureau du protecteur du citoyen, qui produira un rapport de recommandations en 1997[4] à la Commission des institutions de l’Assemblée nationale, demandant nottament des excuses publiques du gouvernement, de la profession médicale et des organismes religieux ainsi que des dédommagements pour les victimes[4]. Néanmoins, le gouvernement québécois de Lucien Bouchard refusa toujours de tenir une enquête et faire toute la lumière sur le scandale[réf. nécessaire].

Le 4 mars 1999, le gouvernement péquiste, après cinq ans au pouvoir, fit des excuses publiques à l'Assemblée nationale[2]. Il offre également Une subvention de 300 000$ au Comité des orphelins et orphelines institutionnalisés de Duplessis, ainsi qu'un fonds de trois millions de dollars devant servir à aider environ 3 000 victimes, sans toutefois prévoir de compensations individuelles aux victimes[1],[2]. L'offre sera jugée d'insultante par le responsable du COOID, Bruno Roy[7] .

De son côté, le Collège des médecins formulera des regrets dans une lettre adressées aux orphelins en 2012[1], pendant que l'Église restera muette[2].

Le 30 juin 2001, les Orphelins reçoivent une offre bonifiée de la part du gouvernement de Bernard Landry (Parti québécois) pour une compensation fixe de 10 000 $CAD par personne, plus 1 000 $CAD pour chaque année d'incarcération injuste dans une institution psychiatrique dans le cadre du Programme national de réconciliation[1],[7],[2]. En échange de la compensation, le COOID devait renoncer à toute autre poursuite[1],[8].

L'offre montait donc entre 20 000 et 30 000 dollars CAD par orphelin[8]; elle était toutefois limitée aux 1 100 orphelins survivants que le gouvernement avait déclarés déficients mentaux, n'incluant pas de compensation pour les victimes d'abus sexuels ou d'autres formes d'abus. Les requérants admissibles sont déçus du montant, mais acceptent tout de même l'offre[2].

L'espérance de vie des orphelins de Duplessis se situe bien en dessous de la moyenne nationale[réf. souhaitée]. En 2010, La Presse Canadienne estime qu'uniquement 300 à 400 des orphelins de Duplessis sont toujours vivants[11].

Notes

  1. Le Mont-Providence était dirigé par la communauté des Sœurs de la Charité de la Providence et était situé au 7200, boulevard Gouin est à Montréal. Vendu au gouvernement du Québec en 1969, l'immeuble est devenu l'Hôpital Rivière-des-Prairies.
  2. L'Hôpital Saint-Anne de Baie-Saint-Paul.
  3. l’Orphelinat Notre-Dame de la Merci d’Huberdeau était situé dans la municipalité d'Huberdeau dans les Laurentides.
  4. L'Hôpital Saint-Jean-de-Dieu est devenu l'Hôpital Louis-H.-Lafontaine et il est situé à Montréal.
  5. L'Hôpital St-Michel-Archange est devenue le Centre hospitalier Robert-Giffard et il est situé dans la ville de Québec.
  6. L'Hôpital Saint-Julien est situé dans la municipalité de Saint-Ferdinand.
  7. Encore à ce jour, plusieurs orphelins de Duplessis n'ont pas réussi à obtenir copie de leurs dossiers médicaux conservés chez des communautés religieuses.

Références

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  1. a b c d e f g h i j k l m n o et p Serge Dupuis, « Orphelins de Duplessis », sur L'encyclopédie Canadienne, (consulté le )
  2. a b c d e f g h i j k et l Zone Société- ICI.Radio-Canada.ca, « Le 4 mars 1999, des excuses pour les orphelins de Duplessis », sur Radio-Canada, (consulté le )
  3. a b c et d Magdaline Boutros, « Les orphelins de Duplessis se sentent oubliés », sur Le Devoir, (consulté le )
  4. a b c d e f g h i j k l m n o p et q François Boudreau et Adje Van de Sande, « Les orphelins de Duplessis », Nouvelles pratiques sociales, vol. 13, no 2,‎ , p. 121-130 (DOI https://doi.org/10.7202/000817, lire en ligne)
  5. a b et c « Le testament d’un orphelin de Duplessis », sur TVA Nouvelles, (consulté le )
  6. a et b Télé-Québec. Kebec (S2 - E3) La marginalité - Les figures à contre-courant (2020). Production: Zone3 inc. - Canada, 2023. URL https://video.telequebec.tv/player/28807/stream?assetType=episodes
  7. a b c d e f g et h Denis Lessard, « Il y a 20 ans, Québec indemnisait les orphelins de Duplessis: « Le passé ne pourra jamais être refait » », La Presse,‎ (lire en ligne, consulté le )
  8. a b c d e f et g « Saint-Père, n’oubliez pas les orphelins de Duplessis », sur Le Devoir, (consulté le )
  9. Le Protecteur du Citoyen (Daniel Jacoby), document Les « enfants de Duplessis » : à l'heure de la solidarité, Sainte-Foy, 22 janvier 1997.
  10. Louis Blanchet, « La santé mentale, des facteurs sociaux et des coûts », Où va la psychiatrie ?, Revue Santé mentale au Québec, vol. 6, no 2,‎ (ISSN 0383-6320, DOI https://doi.org/10.7202/030101ar, lire en ligne)
  11. Scandale sexuel - Les orphelins de Duplessis dénoncent l'inertie de l'Église et exigent ses excuses publiques Le Devoir, 3 avril 2010.

Bibliographie et autres médias

Livres

  • Baugé-Prévost, Jacques, Plaidoyer d'un ex-orphelin réprouvé de Duplessis, Éditions Québecor, Outremont, 1999, 219 pages.
  • Dufour, Rose, en collaboration avec Brigitte Garneau, Naître rien: des orphelins de Duplessis, de la crèche à l'asile, Éditions MultiMondes, Sainte-Foy, 2002, 324 pages.
  • Labrosse, Jean-Guy, Ma chienne de vie, Les Éditions du Jour, Montréal, 1964, 141 pages.
  • Labrosse, Jean-Guy, L'holocauste des orphelins: sous le régime Duplessis, Édition J.-G. Labrosse, Québec, 1983, 198 pages.
  • Jean-Charles Pagé, “Les fous crient au secours” 1961
  • Pauline Gill, Les Enfants de Duplessis: l'histoire vraie d'Alice Quinton, orpheline enfermée dans un asile à l'âge de 7 ans, Libre Expressions, Montréal, 1991, 271 pages (réédité en 2004, 385 pages).
  • Le Protecteur du citoyen, Les “Enfants de Duplessis” : à l'heure de la solidarité : document de réflexion et de consultation pour fins de décision, Le Protecteur du citoyen, Assemblée nationale, Sainte-Foy, 1997, 64 pages.
  • Bruno Roy, Mémoires d'asile, Boréal, Montréal, 1994.
  • Bruno Roy, Les calepins de Julien, XYZ éditeur, Montréal, 1998, 355 pages.
  • Bruno Roy, Les heures sauvage, XYZ éditeur, Montréal, 2001, 177 pages.
  • Vienneau, Rod, Les enfants de la grande noirceur: les orphelins de Duplessis: révélations chocs par la Commission pour les victimes de crimes contre l'humanité dans le dossier des orphelins de Duplessis, Édition R. Vienneau, Joliette, 2008, 251 pages.

Ressource électronique

  • Emploi et Solidarité sociale (gouvernement du Québec), Le programme national de réconciliation avec les orphelins de Duplessis ayant fréquenté certaines institutions, 2007.

Films et téléséries

  • Les Orphelins de Duplessis, télésérie en quatre épisodes, Production Télé-Action, Diffusion Société Radio-Canada, 1997.
  • Nestor et les oubliés/Nestor and Forgotten, réalisation Benoît Pilon, Films Seville, 2007, 75 minutes.

Musique

  • O douce Providence, une composition d'Alyssa Ryvers avec Hervé Bertrand, orphelin de Duplessis. 2016.

Romans

Liens externes

  • Le site officiel des Orphelins de Duplessis
  • Orphelins de Duplessis, enfants d'asile, Radio-Canada. Date de diffusion :
  • Orphelins de Duplessis: Bruno Roy dénonce la conspiration de l'Église et de l'État. Date de diffusion :
  • Le Comité des orphelins et des orphelines institutionnalisés de Duplessis (COOID)
  • Le Mouvement Retrouvailles
  • Témoignage audio d'une victime: Joseph Martin
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